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La cour des comptes surveille le patrimoine culturel et sa gestion

45 sujets différents sont évoqués dans le rapport 2013 de la Cour des Comptes. Ce rapport public annuel ne vise pas seulement à épingler les comportements, mais aussi à identifier les réformes engagées, celles à prolonger ou à entreprendre, ainsi que les marges d’économies possibles. Il est assorti de recommandations. Cette année plusieurs sujets concernent le patrimoine culturel et les monuments : le Mont Saint Michel, le Centre des monuments nationaux, la Fondation du Patrimoine et en marge du rapport, un référé sur les phares de France.

Le rétablissement du caractère maritime du Mont Saint-Michel : un projet mal conduit
Le rétablissement du caractère maritime du Mont-Saint-Michel est un vaste projet dont les modalités de pilotage apparaissent inadaptées. Seul responsable de la conception technique des ouvrages à élaborer, l’Etat s’est désengagé de la réalisation des investissements au profit d’une structure de maîtrise d’ouvrage exclusivement composée de collectivités territoriales : le syndicat mixte Baie du Mont-Saint-Michel. Le comité de pilotage conjoint  n’a juridiquement aucun pouvoir.
Les difficultés du syndicat mixte à assurer, depuis le début des travaux en 2006, un suivi administratif et financier rigoureux, ainsi que les problèmes rencontrés dans le contrôle du délégataire chargé des ouvrages et des services d’accueil, appellent une nouvelle réflexion sur la gouvernance et pour la conduite du projet. S’ajoute une incertitude sur les conditions de financement des charges de fonctionnement dans une perspective pérenne à partir de 2015, date prévisionnelle d’achèvement des travaux.
La Cour et la chambre régionale des comptes de Basse- Normandie, Haute-Normandie formulent les recommandations suivantes :
1. engager une nouvelle réflexion sur la gouvernance et la conduite opérationnelle du projet, en intégrant les dimensions culturelle, touristique et environnementale du site, notamment de façon à faire participer au syndicat les collectivités qui financent le projet ;
2. exercer effectivement le contrôle financier du syndicat mixte, en tant que concessionnaire du domaine public maritime relevant de l’ûtat ;
3. inciter les collectivités territoriales concernées à définir précisément la répartition des financements pour l’exploitation du site, à compter de 2015, année prévue pour la fin des travaux ;
Pour le syndicat mixte Baie du Mont-Saint-Michel :
4. élaborer un véritable plan d’amortissement à partir d’un inventaire de l’actif régulièrement mis à jour et évaluer précisément les futures charges de fonctionnement ;
5. mettre en place le contrôle du délégataire, notamment en matière de gestion des ouvrages d’accueil ;
6. fiabiliser le suivi financier du projet.
Le Centre des monuments nationaux : un redressement tardif
En 2010, la Cour a réalisé, à la demande de la commission des finances du Sénat, une enquête sur le CMN. Les recommandations de la Cour n’ont reçu, de la part du Centre des monuments nationaux (CMN), qu’une mise en oeuvre partielle. Certaines d’entre elles revêtaient un caractère moins pressant du fait de changements de circonstances. D’autres ont été suivies d’effet, comme la définition d’une courbe de croissance des ressources propres dans le contrat de performances. Toutefois, la plupart ont été mises en oeuvre que de façon partielle ou tardive. La Cour est donc amenée à réitérer des recommandations :
1. actualiser la définition réglementaire, ainsi que le périmètre des monuments dont le CMN a la charge
2. ajuster leur statut au nouveau régime de la domanialité publique ;
3. rendre pleinement effective la capacité de maîtrise d’ouvrage de l’établissement et de mettre fin à la sous-consommation de ses crédits d’entretien et de restauration.
Par ailleurs, la Cour recommande au CMN et à sa tutelle de poursuivre les progrès encore insuffisants engagés sur le plan de la gestion dans la ligne des recommandations qu’elle formulait en 2010 :
4. mettre en place des outils de mesure de ses coûts ;
5. assigner à l’établissement un niveau plus exigeant de ressources propres ;
6. mobiliser les ressources financières excédentaires de l’établissement pour la restauration des monuments.
La Cour recommande enfin de :
7. réexaminer l’affectation d’une fraction du produit de la taxe sur les jeux en ligne, qui s’est révélée peu adaptée aux besoins du CMN et préjudiciable à l’ unicité et à la maîtrise budgétaires.
La Fondation du patrimoine : un modèle singulier 
Instituée par la loi du 2 juillet 1996 et reconnue d’utilité publique par un décret du 18 avril 1997, la Fondation du patrimoine a pour objet de contribuer à la conservation et à la valorisation de ce patrimoine non protégé en mobilisant les soutiens privés. Quinze grandes entreprises ont participé à la constitution de son capital initial et détiennent encore aujourd’hui la majorité des voix au sein du conseil d’ administration. La fondation dispose d’ environ 32 millions d’euros de ressources annuelles, dont une part significative de concours publics représentant, selon les années, entre 35 et 50 % de l’ensemble.
Créée par le législateur pour mobiliser l’initiative privée en faveur du patrimoine non protégé, la Fondation du patrimoine n’a pu mener à bien cette mission sans les financement publics pérennes qui lui ont été attribués sous la forme de subventions de collectivités territoriales et surtout d’une recette affectée en provenance du budget de l’ûtat.
Cet organisme hybride, mi-public, mi-privé, est maintenant chargé, quasiment seul à l’échelle nationale, et avec un certain succès, de la mission d’intérêt général de préservation active du patrimoine non protégé, et cela, en l’absence de politique d’ensemble en ce domaine. La Cour constate que le bilan de la Fondation du patrimoine a conduit à des actions positives, mais que les crédits publics qui lui sont confiés doivent être mieux encadrés. Par ailleurs, elle estime que la fondation doit davantage développer son action en s’appuyant sur la mobilisation de fonds privés.
La Cour formule les recommandations suivantes:
Pour l’Etat :
1. informer chaque année le Parlement du montant et de l’emploi de la recette domaniale « successions en déshérence » affectée à la fondation ;
2. instituer un mécanisme de plafonnement de cette recette affectée ;
3. inscrire les relations entre la Fondation du patrimoine et le ministère chargé de la culture dans une politique nationale du patrimoine non protégé dont le contenu reste à définir.
Pour la Fondation du patrimoine :
4. renforcer le contrôle du siège sur les délégations régionales en matière financière ;
5. approfondir le développement des ressources privées moins exploitées à ce jour : relance du mécénat d’entreprise et du dispositif d’adhésion initialement prévu ;
6. appliquer l’ensemble des obligations relatives à l’appel à la générosité publique, dans le cadre des souscriptions de « mécénat populaire ».

Les phares et balises : la gestion du patrimoine
La Cour des comptes a également rendu public, quelques jours avant son rapport annuel, un référé sur le contrôle de la gestion du patrimoine des 250 phares et balises en France. L’état général des phares fait craindre des dépenses accrues d’entretien, voire des dépenses nouvelles lourdes de remise en état. La Cour estime que leur valorisation patrimoniale par le Conservatoire du littoral est loin d’être acquise faute de garanties juridiques et financières. Par ailleurs, l’occupation de certains sites par des associations sportives, culturelles et d’entraide doit être clarifiée. Enfin, la connaissance des sites et de leur valeur doit être améliorée.

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