La restauration de la cathédrale Notre-Dame de Paris franchit une nouvelle étape symbolique et technique : l’établissement public Rebâtir Notre-Dame de Paris annonce l’achèvement des jougs des deux bourdons de la tour sud. Une opération hautement spécialisée qui mobilise savoir-faire artisanal et expertise patrimoniale, en vue de la remise en volée prochaine des cloches historiques Emmanuel et Marie.

Une mécanique monumentale pour des cloches d’exception

Perchés à près de 60 mètres de hauteur dans le beffroi sud, les bourdons Emmanuel (13,3 tonnes) et Marie (6,2 tonnes) sont les plus imposantes cloches de Notre-Dame. Emmanuel, daté de 1686, est considéré comme l’un des plus beaux bourdons d’Europe. Marie, sa cadette, a été installée en 2013 à l’occasion du 850e anniversaire de la cathédrale. Pour les faire résonner à la volée, chaque cloche repose sur un joug, une pièce maîtresse en bois de chêne massif, aussi massive que technique.

Si le beffroi sud a été épargné par l’incendie de 2019, l’examen des structures a révélé la fragilité des anciens jougs. Leur remplacement intégral a donc été décidé, en profitant des aménagements du chantier de reconstruction.

Pose et ajustage du chapeau, 3ème et dernière pièce en bois de chêne massif formant le joug du bourdon Emmanuel. Photo : David Bordes © Rebâtir Notre-Dame de Paris

 

Un chantier artisanal d’une rare technicité

C’est en mars 2025 que l’établissement public a confié la réalisation des nouveaux jougs à un groupement de sept PME artisanales membres du réseau ATC (Artisans et Techniciens Campanaires), sous la houlette de la société Gougeon (Indre-et-Loire). Leur mission : concevoir et façonner ces imposantes pièces selon des méthodes traditionnelles, tout en répondant à des contraintes mécaniques très contemporaines.

La fabrication, réalisée dans les ateliers de la société Voegele à Strasbourg, a mobilisé une équipe de neuf artisans campanaires durant plus de 500 heures. Les étapes sont nombreuses : sélection de poutres brutes de chêne âgées de 10 à 15 ans, calibrage, entaillage, ponçage, traitement à l’huile de lin, sans oublier la fabrication sur mesure des éléments métalliques – axes, brides, boulonnerie, roulements – indispensables à la suspension et au balancement des cloches.

Le montage à blanc, réalisé en juin, a permis de valider l’ensemble des assemblages avant leur démontage, transport et réinstallation pièce par pièce dans la tour sud.

Un patrimoine vivant, remis en mouvement

Ce chantier illustre la diversité des interventions engagées sur Notre-Dame, bien au-delà des dommages liés à l’incendie. « Grâce au talent et au savoir-faire des artisans campanistes, nous découvrons aujourd’hui le nouveau joug que le gros bourdon Emmanuel va bientôt recevoir pour accompagner à nouveau le culte catholique et les grands événements de la Nation », s’est félicité Philippe Jost, président de l’établissement public.

La remise en volée des bourdons est prévue en cohérence avec la réouverture du circuit de visite des tours, pilotée par le Centre des monuments nationaux, attendue pour cette année.

Photo : Équipes de la Société Voegle Artisans Campaniles de l’Est et de la maîtrise d’ouvrage, 3e et 5e en partant de la gauche : Philippe Jost, président de l’établissement public Rebâtir Notre-Dame de Paris, Julien Calcatera, directeur de la société Voegle. Crédit : David Bordes © Rebâtir Notre-Dame de Paris